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Captivés par le ca trù…

Captivés par le ca trù…

L’auditorium de l’espace, à hanoi, a fait salle comble le 13 juin avec la représentation de ca trù de la vénérée pho thi kim duc et ses disciples. malgré les chaleurs de l’été hanoien, les derniers spectateurs n’ont pas hésité à rester debout plus d’une heure durant pour pouvoir assister à cette rare représentation de l’artiste à l’âge vénérable.

Vibrant hommage au patrimoine culturel du vietnam, la représentation présentait quatre chanteuses, quatre virtuoses du chant de ca trù. les trois élèves de mme pho thi kim duc ont héritées du talent de leur maître. elles ont touchées le public par leurs maîtrises sans pareilles de ce chant ancestral. chacune avec sa grâce particulière, a su transmettre la mélancolie, le romantisme ou la douceur contemplative contenue dans ces chants. et si l’émotion était là, une certaine impatience régnait également dans la salle. les spectateurs attendaient avec une ferveur palpable que la chanteuse à l’âge vénérable prenne le micro. son apport pour l’art du ca trù est inestimable. issue d’une famille d’artistes baignant dans cette tradition, elle a commencé à pratiquer cet art à l’âge de 7 ans avant de donner, quatre ans plus tard seulement, ses premiers concerts. son immense aura d’aujourd’hui est sans conteste. elle la doit à la fois à ses mémorables prestations à la radio, ses recherches sur le chant traditionnel et la manière dont elle a su transmettre sa passion sans déroger à sa pureté originelle.

Une musique ancestrale qui lie popularité et raffinement aristocratique... le ca trù, étant à l’origine le chant des courtisanes, tire sa beauté de la rencontre entre musique et poésie. deux arts qui se rassemblent pour créer cette magie particulière. les francophones ont alors pu regretter de ne pas avoir accès à ces paroles dont on devine seulement la beauté. le contenu de ces textes centenaires leur sont restés inaccessible mais demeuraient tout de même les rythmes et la beauté des rimes. de plus, une courte présentation des chansons en vietnamien et en français précédait chacune d’elles. quelques mots bienvenus pour guider l’imagination des spectateurs, qui n’avaient pas besoin de beaucoup plus pour se laisser porter par des chants résonnant de la grâce d’une autre époque. de fait, l’art musical né au xie siècle a su conserver par la rigueur des règles et codes qui lui sont impliqués un charme ancestral. ce qui lui vaut aujourd’hui d’être classé comme patrimoine immatériel de l'humanité par l’unesco.

Une reconnaissance qui permettra, on l’espère, de préserver cet art d’une délicatesse infinie. la manière dont ces femmes font vibrer leurs voix au rythme du phách, instrument de bambou frappé avec deux morceaux de bois ne peut être comparées à aucun autre chant au monde. accompagnées au dàn đáy, un luth à trois cordes, et du rythme énergique du tambour d’éloge trang chau, leur musique porte une harmonie fabuleuse. les oreilles des auditeurs non initiés ne peuvent être que surprises par ces sonorités nouvelles, touchantes et enivrantes en même temps. mais la salle comptait également de fins connaisseurs de ca trù venus écouter la chanteuse de 82 ans dont la maîtrise reste inégalée. sa voix toujours plus timbrée au fil des années fut plus bouleversante que jamais.

On serait bien restés des heures durant, bercés par ces chants terriblement émouvants… mais la représentation a dû s’achever après une heure seulement pour respecter la santé fragile de l’artiste légendaire. une heure passée trop vite, comme un voyage d’un lyrisme délicieux…

11/02/2013 11:36