Le nghê, qui est un animal mythique inspiré du chien, est aussi un motif décoratif purement vietnamien. Il est actuellement présenté dans l’exposition « Le lion et le nghê dans la sculpture antique vietnamienne » qui se tient au Musée des beaux-arts de Ho Chi Minh-ville.
Dans la vie des agriculteurs vietnamiens, les animaux les plus familiers sont le buffle et le chien, le premier les aide à labourer le champ et le second, à garder la maison. C’est cette idée de garde qui a valu au chien une place prépondérante dans la vie spirituelle des Vietnamiens. Ils l’ont sacralisé à travers leurs sculptures. Ainsi, dans les villages typiques du Nord Vietnam, il y a toujours un chien en pierre qui garde l’entrée pour protéger les villageois des mauvais esprits. Ces chiens protecteurs sont également installés à l’entrée des maisons. Souvent, ils sont sculptés de manière figurative mais parfois aussi, il s’agit simplement d’une pierre inclinée rappelant vaguement la silhouette d’un chien. Lorsqu’ils sont installés dans des endroits plus solennels, tels que les temples, les pagodes, les sanctuaires… ces chiens prennent une forme plus stylisée, celle du nghê. A travers les siècles, le nghê vietnamien se différencie de plus en plus du qilin chinois. Si ce dernier est à mi-chemin entre le lion et le dragon, avec des cornes et des écailles, un globe dans sa bouche ou sous ses pattes, le nghê vietnamien n’a pas de cornes. Il a un corps mince et des pattes de chien. Nguyen Thanh Tung, chercheur culturel à Ho Chi Minh-ville :« Nos ancêtres ont inventé le nghê qui ne ressemble à aucune autre créature au monde. Je suis très ému de voir de nombreux étudiants venir ici admirer chaque objet, avec beaucoup de respect, comme s’ils voulaient apprendre autant que possible du patrimoine culturel national. » Pendant plusieurs siècles, le nghê était un motif décoratif récurrent dans les maisons communales vietnamiennes. Il figure sur l’entrait ou sur les extrémités du toit, comme c’est le cas des maisons communales d’An Hoa (province de Ha Nam), de Phat Loc (province de Thai Binh), de Phu Lao (province de Bac Giang) ou encore de Trung Can (province de Nghe An). L’exposition au Musée des beaux-arts de Ho Chi Minh-ville présente 60 sculptures de nghê en pierre, en céramique, en faïence, en bois ou en cuivre. Le public y trouve également des documents scientifiques retraçant l’histoire du nghê dans la sculpture vietnamienne, du 11ème au 19ème siècle. Tran Thi Huynh Mai, étudiante en beaux-arts industriels, de l’université Van Lang : « Je suis venue pour apprendre à distinguer les motifs sculpturaux vietnamiens de ceux des autres pays d’Asie du Sud-Est ou de la Chine. C’est absolument nécessaire pour mes futures œuvres. » L’ouverture du pays au monde a entraîné l’arrivée massive de produits culturels étrangers. Quelle sera donc la place des produits vietnamiens ? Les expositions comme celle-ci contribuent à apporter une réponse, en ce sens qu’elles honorent la culture traditionnelle et éveillent la fierté des Vietnamiens vis-à-vis de leurs valeurs patrimoniales. L’exposition « Le lion et le nghê dans la sculpture antique vietnamienne » durera jusqu’au 12 février au musée des beaux-arts de Ho Chi Minh-ville.